Transformation digitale : de quoi parle-t-on exactement ?
Par Philippe Gerard le 4 mars 2015
Aucune entreprise n’échappe à la règle où les gens et les objets doivent pouvoir être interconnectés à tout moment, en tout lieu, avec n’importe quel appareil (si bien illustré par l’acronyme ATAWAD : anytime – anywhere – anydevice). Et pour beaucoup cela ne peut se faire sans une transformation digitale. Découvrez toutes nos explications pour vous aider à rendre ce concept plus concret.
Toutes les activités sont concernées, même les plus ancrées dans le réel : la médecine (télé-chirurgie), l’agriculture (drones, tracteur sans pilote), les transports (e-billets, NFC), le BTP (tablettes tactiles sur les chantiers, impression 3D)… Même les restaurants et les hôtels – lieux on ne peut plus réels – sont impactés, voire conditionnés, par le digital, par les plateformes de réservations en ligne, les comparateurs, les avis de consommateurs, les conversations sur les médias sociaux.
Transformation digitale : la dématérialisation de l’entreprise
Ces exemples donnent encore peu la mesure de ce que signifie la transformation digitale pour les entreprises. Le numérique ne touche plus seulement la manière dont on commercialise produits ou services mais l’activité professionnelle dans son ensemble.
Alors transformation digitale, de quoi parle t-on exactement ?
Pour le dire simplement : la transformation digitale de l’entreprise réside dans la numérisation de son activité.
Mais de toute son activité. Pas seulement la digitalisation des canaux commerciaux, marketing et communication. Ce à quoi on réduit trop souvent la transformation digitale.
D’abord, la transformation digitale n’est pas un phénomène nouveau : l’informatique d’entreprise en était la première marche. Puis les premiers sites marchands (années 90) en ont offert l’aspect le plus visible aux consommateurs. Amazon en tête. Jusqu’au début de ce siècle, économie traditionnelle et économie numérique pouvaient encore cohabiter. La seconde grignotant peu à peu la première… Jusqu’à rendre aujourd’hui impossible la création d’une entreprise qui ne serait pas, a minima, digitale.
Transformer les entreprises du siècle dernier
Si le sujet de la transformation digitale est aussi fréquemment abordé aujourd’hui, c’est que chacun a bien conscience que l’informatique, les réseaux, les logiciels, les algorithmes et les data vont définitivement transformer le monde que connaissaient les pré-numériques ou digital migrants ; autrement dit, les générations des boomers et des X. Car le concept de transformation digitale s’adresse d’abord à eux. Les générations suivantes, les digital natives, elles, n’ont pas à s’en convaincre.
Les générations, il en va de même pour les entreprises que pour les hommes. Ce sont donc les entreprises nées avant les années 90, bâties sur un modèle ancien, qui doivent se réinventer à l’heure du numérique.
Comparativement, les start-up s’épanouissent dans une culture digitale omniprésente où se structurent de nouveaux modes de développement (lean start-up), de création et d’organisation (méthodes agiles), avec une nouvelle vision du travail (management collaboratif). C’est bien sûr d’elles dont il faut s’inspirer pour s’adapter au monde digital.
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Transformation digitale : une évolution autour de 3 axes
Alors bien sûr, la transformation digitale n’est pas que la numérisation de l’entreprise… La transformation digitale consiste à faire évoluer l’activité de l’entreprise – dans un monde digital et connecté – autour de trois axes fondamentaux : le business model, l’expérience-client et l’organisation de l’entreprise.
1. Revoir le business model
Pour l’entreprise, la transformation digitale ébranle tous les piliers sur lesquels elle repose. À commencer par le business model. La question fondamentale que pose la transformation digitale pour les entreprises pré-numériques, c’est bien de savoir comment générer du chiffre d’affaires, de la marge, dans un monde digital.
2. Ajuster l’expérience-client
Pas d’expérience-client optimale sans une connaissance plus approfondie du client. Le recueil et l’analyse des données deviennent les perspectives fondamentales de cette connaissance-client. Un marketing de plus en plus personnalisé, qui va s’efforcer de rendre aussi fluide que possible le parcours-client. On se souvient bien sûr du célèbre ZMOT (zero moment of truth) de Google. Cette connaissance-client doit aussi tenir compte de tous les points de contact du consommateur avec la marque, le produit ou le service.
3. Repenser l’organisation
La réflexion sur la transformation digitale doit d’abord porter sur l’analyse préalable de la maturité digitale. Intégrer le numérique dans chacune des dimensions et service de l’entreprise, c’est la préoccupation essentielle qui doit guider ses dirigeants. Le tout orienté par une vision d’ensemble, souvent portée dans les entreprises par le Chief digital officer (CDO) dont la fonction consistera principalement à élaborer et appliquer la stratégie digitale globale.
=>Lire aussi Transformation digitale : les 4 leviers pour la réussir
Pourquoi la transformation digitale fait-elle si peur ?
La transformation digitale, au fond, c’est donc un processus que les entreprises connaissent déjà, et qui a démarré d’abord, avec l’informatique. La dématérialisation des données et le traitement de l’information. Toutes les entreprises ont donc opéré leur transformation digitale depuis longtemps.
Heureusement. En dématérialisant leurs documents (bureautique, GED, Intranet) ; en structurant leurs données (SGBD) et organisant leurs flux d’activité (workflows). Mais quelque chose fait qu’aujourd’hui les entreprises traditionnelles se sentent au pied du mur. Et c’est très certainement l’opposition de leur modèle ancien, déclinant, face celui des entreprises numériques, notamment les pure players, 100% digitaux, dont la réussite peut être fulgurante et devenir ultra-dominante, à l’image des fameux GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon). De tels succès étaient purement inimaginables dans un monde non-digital.
Penser digital first
Ce qui fait peur, c’est donc que les modèles économiques sont disruptifs. Et non évolutifs. Ce qui fait peur, c’est que les entreprises comprennent, douloureusement, que les modèles qui fonctionnent aujourd’hui sont radicalement différents des précédents. Et que pour se transformer, il va falloir faire table rase du passé. Et toutes les entreprises n’y sont pas prêtes, loin de là. Tout au mieux, celles qui se figent sur leur modèle passé, pourront-elles s’adapter. En agissant sur les points cités plus haut.
Mais la véritable clé de réussite pour réussir la transformation digitale, c’est de transformer d’abord les esprits, les comportements, les pratiques et changer l’état d’esprit de l’entreprise. La clé de réussite de la transformation, c’est penser : digital first .
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Pascale Il y a 9 années
Digital first, c’est à mon avis LE Levier de la transformation digital, mais aussi le plus difficile à actionner !
Philippe Gerard Il y a 9 années
En effet ! Le « digital first » est un levier difficile à actionner pour les entreprises qui considèrent trop souvent le digital comme un « ajout » à leur activité traditionnelle… Alors qu’il s’agit d’une vraie rupture de pensée et de modèle.
Pour nombre d’entreprises, il est tout simplement « inconcevable » de se remettre en cause à ce point. Pas facile, il est vrai, de démonter un modèle économique qui fonctionnait, plus ou moins bien, jusque là. Pourtant, dans un monde entièrement « digitalisé », il n’y aura pas d’autre choix que de le remettre en cause…
A2l-concept Il y a 9 années
Repenser l’organisation me parait indispensable à cette transformation. Très bon article!
Clem Il y a 7 années
Oui en effet ! Mais penser formation/ éducation interne également.
Il y a un cabinet de consulting qui aide en ce sens avec des Cooc, c’est http://www.akorconsulting.com
Pierre Il y a 9 années
Effectivement il s’agit une étape très importante. Comment réussir à passer d’une stratégie Offline à Online et Ba ce n’est pas évident.
J’ai plusieurs amis qui possédait des restaurants ils n’ont pas survécu car il ne voyait pas l’intérêt d’internet (centrale de réservation…)
Pierre
marc Il y a 9 années
La transformation digitale qui oublierait de renforcer (et non supprimer) ses contacts avec ses clients (mails, chats, SMS, téléphone ….et rencontres!) sera t’elle à même d’apporter réellement de la valeur à moyen terme?
Marc Bosvieux
Philippe Gerard Il y a 9 années
En effet Marc, merci pour cet éclairage, la transformation digitale est avant tout humaine et culturelle, bien plus que technologique, même si cette dernière en est, bien sûr, la condition. Accompagner la transformation digitale, c’est aussi renforcer le contact dans le monde « réel ». Le digital est aussi un moyen de renforcer la connaissance et l’expérience client. et donc de tisser un lien plus étroit avec lui, ce qui est un élément de valeur. D’autre part, cette transformation n’est qu’une étape transitoire vers un monde où les technologies deviendront de plus en plus transparentes et intuitives, laissant une grande place à l’humain.
marc Il y a 9 années
Tout à fait d’accord Thierry
Le plus intéressant dans cette transformation est qu’elle ne touche pas que les actifs et les entreprises…
La transformation est bien plus globale!
Snavely Il y a 9 années
Oui effectivement, la transformation digitale des entreprises se repose en grande partie sur une transformation purement humaine. Le passage vers l’ère du numérique pour les entreprises tricolores ne se limite pas seulement à la numérisation de son capitale matériel, chaque collaborateur doit changer d’état d’esprit indépendamment pour faire entrer le digital dans la vie quotidienne de l’entreprise. En ce moment, les dirigeants ainsi que leurs collaborateurs sont invités à réfléchir ensemble sur les pratiques de la transformation digitale. Philippe Le Meau, directeur général d’ADLP Digital, ainsi que d’autres décideurs, confirme l’idée que le passage vers le numériques pour les industriels s’appuie sur l’humain. http://www.usine-digitale.fr/article/transformation-digitale-une-transformation-humaine.N295020
bosvieux Il y a 9 années
Sinon, la transformation risque d’être contre productive (les exemples étant beaucoup trop nombreux)
Gilles Il y a 9 années
Je me pose une question de sémantique : est ce que l’adjectif approprié qui est « numérique » et pas « digital » est totalement banni ?
https://fr.wikipedia.org/wiki/Digital
Va t-on devoir perdre progressivement notre langue française, d’ailleurs admirée par les anglo-saxons, à force d’emboîter le pas de communicants et décideurs incultes ? En français digital évoque les doigts, le toucher, voire la sensualité… mais vraiment pas l’informatique.
Alors définitivement mort, numérique ?
Philippe Gérard Il y a 9 années
Digital ou numérique, la question fait débat…, J’avais rappelé la position de l’Académie française sur ce point : http://www.communication-web.net/2014/02/03/quest-ce-que-la-communication-digitale/ . En résumé un extrait de ce billet : Le Digital recouvre une réalité plus large qu’un nouvel anglicisme (qui traduit, toutefois, le caractère planétaire du numérique). L’usage du terme digital semble aujourd’hui s’imposer… comme jadis le Web face à la Toile.
Jerome Il y a 8 années
« Digital first », très certainement, mais j’ajouterai aussi digital understanding, car ce n’est pas complètement acquis pour tous. Bien des entreprises sont encore bien cramponnées à leur vieux système de fonctionnement. Chaque entreprise doit se l’approprier progressivement avec recul et pragmatisme. A se digitaliser dans l’urgence, elles y perdront des plumes. http://www.business-marketing.fr/entreprises-b2b-et-digital/
Jerome Il y a 8 années
Et pourtant les entreprises ayant passé le pas en sont plutot satisfaites : http://www.business-marketing.fr/selon-9-entreprises-sur-10-le-digital-a-un-impact-positif-leur-activite/
VALERIE Il y a 8 années
Le digital : indispensable dans l’entreprise, mais il est parfait difficile voire impossible d’obtenir des formations suffisantes sur le sujet, quand une direction veut accaparer/ controler le sujet . Heureusement, il y a votre MOOC!
Colormystik Il y a 8 années
Heu…Jacques Attali n’est pas du tout d’accord avec le moindre argument évoqué ici
Pour lui les entreprises traditionnelles dans leur business model ont encore beaucoup d’avenir devant elles
Voyez comment il dtorpille une analyse de Jeremy Rifkin via ce lien https://www.youtube.com/watch?v=iag1ZOUp8mA
corinne Kamseu Il y a 8 années
Décidément, je découvre vos articles et ils me satisfont à un point…l’approche macro que vous avez de la transformation digitale change un peu de ce que je lis ailleurs. en effet, je m’interesse à la performance digitale et naturellement la transformation digitale des organisations, des entreprises est un sujet prioritaire pour moi. Au Cameroun où je vis, je pourrai dire que 2 tendances se dessinent d’un coté les start up qui sont des pure players de l’autre l’ancien modèle qui redoute un peu les changements qui peuvent découler de la numérisation de leurs activités. (transparence, meilleure gouvernance etc.) les enjeux sont en effet colossaux pour nous. cet article tombe à pic, très pertinent. merci
Philippe Gerard Il y a 7 années
Merci beaucoup pour vos commentaires et votre point de vue; ravi de savoir que les billets du blog vous sont utiles et servent votre activité.
Cécile Il y a 7 années
Bonjour, je m’interroge un peu quant à la transformation digitale des entreprises ayant une forte compétence technologique : quel peut-être la conséquence d’une non migration digitale ? J’aurais tendance à penser : aucune ! La compétence technologique est un savoir-faire qui perdurera dans l’entreprise. Qu’en pensez-vous ?
Agigliobianco Il y a 7 années
Digitale First ? Oui
Dans la mesure où elle conduit à une meilleure efficacité des process opérationnels dans l’entreprise.
Le problème décisionnel réside maintenant dans les méthodes à suivre pour réussir à la fois la digitalisation des activités et l’amélioration des performances et des résultats…
croissance ? amélioration des marges opérationnelles ?
Tout cela sans mettre en péril la maitrise des données de l’entreprise ? Sans l’exposer aux risques d’intrusion malveillante ? etc …
Un des exemples concrets de la transformation digitale réside dans l’usage de services Cloud. Cela en vue de transformer les investissements informatique en cout de location.
Cela est très bien mais où seront stockés les données ? Peut on faire confiance aux GAFAM ?
En alternative, Des startups françaises proposent des solutions de cloud privé ou hybride comme par exemple MyBO CloudBoxOffice : Messageries, stockage, poste de travail virtuel.
Aucun expert Cloud est nécessaire en entreprise. En procédant par étape via l’adoption d’un usage progressif visant à ne plus renouveler les postes de travail lourds, les mises à jour de licences logicielles obsolètes en s’appuyant sur un contrat de services Cloud clairs.
En France nous disposons des meilleurs ingénieurs en système d’information au monde.
Donnons leur les clés de la construction des systèmes d’information de nos entreprises via la mise en œuvre de solutions indépendantes des offres proposées par Google, Microsoft et Amazon…
Charles Il y a 7 années
Je rebondis un peu tardivement, mais pour les hôteliers il existe des solutions clé en main qui accompagnent la transformation digitale… Je vous conseille notamment celle-ci : http://www.lolibook.fr/communication-hotel qui actionne tous les leviers nécessaires pour entamer la transformation !
Jean-Philippe Timsit Il y a 7 années
Voici un bon papier, et l’un des rares qui introduit un lien fort entre transformation digitale et business model. C’est souvent un point à côté duquel on passe. La transformation digitale,c ‘est le changement, et le changement passe par une évolution du business model. C’est aussi mon approche, j’espère que cette vision se diffusera et que cela sera plus enseigné. De plus, cela doit être généralisé à la notion de stratégie digitale: http://fr.slideshare.net/jeanphilippetimsit/lart-de-la-stratgie-digitale-pour-les-professionnels
Très bon papier !
Robert Il y a 6 années
Bonjour
C’est bien beau comme article.je travaille moi même dans une activité numérique de haut niveau. Cependant, je me demande tous les jours si le monde n’est pas en train de faire fausse route. Est ce qu’on pourrait vraiment remplacer un chirurgien par un robot ? ! L’humain aura une réaction differente d’une machine programmée. Est ce qu’un pilote de ligne est remplaçable par une machine ? Est ce qu’un ingénieur talentueux pourrait être remplacé par un ordinateur ? Et si on suppose que la réponse est oui. Elle est où la place de l’homme dans ce monde de 0 et de 1? Dans un centre assedic comprenant comme employé un super calculateur qui lui dit tapez 1 sinon tapez 2.
Damien Il y a 6 années
Robert, je vous invite à lire le dernier livre de Laurent Alexandre, voir en replay le dernier envoyé spécial sur l’intelligence artificielle (et consulter l’état de l’art en anglais si vous le pratiquez comme sur le site futur of life institute: https://futureoflife.org/)
Asseyez vous peut etre avant, ca risque de vous chahuter un peu